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17 mars 2023 5 17 /03 /mars /2023 07:52

 

Sans revenir sur la période précédant le COVID, on savait déjà que l’économie mondiale était engluée dans un endettement public et privé considérable. On sait aussi que la période COVID fut globalement un arrêt de l’économie réelle, le maintien des revenus distribués par des Etats ne donnant plus de limites aux déficits, et une aubaine pour les activités liées au numérique. De cette configuration devait résulter un enchaînement logique :

1 - Parce que les banques centrales achètent sans limite les titres de la dette publique et nourrissent le flux des dépenses publiques, l’ensemble des bilans se gonfle, en particulier le passif des banques sur lequel s’agrègent les revenus sans production des agents les plus divers. D’où les débats sur l’importance de l’épargne qui ne correspond à aucune contrepartie réelle en terme de production . Et les banques centrales prennent le plus grand soin de ne pas gêner l’endettement public en organisant le maintien de taux proches de zéro. C’est la stratégie de l’argent facile avec déjà des conséquences sur l’inflation des actifs. Mais aussi un temps béni pour le développement de toutes les activités liées au numérique, activités qui se nourrissent de l’argent facile et des promesses faramineuses de la digitalisation

2 - Dans le même temps les chaînes de la valeur se brisent à l’échelle planétaire. D’abord en raison du COVID qui marque l’arrêt de production d’intrants voir de produits finis, avec ses effets sur une reprise difficile. Il s’agit là du prix de la logique des flux tendus. L’économie réelle est d’autant plus fragile que l’on est habitué à fonctionner sans stocks, une habitude qui s’est accélérée avec la digitalisation.  Ensuite la guerre en Ukraine et ses effets géopolitiques inattendus vont accélérer la fragilité et le manque généralisé d’intrants dans toute l’économie réelle à l’échelle de la planète.

3 - Création monétaire sans limite d’un côté et blocage de l’offre réelle de l’autre facilitent le développement de l’inflation encore une fois à l’échelle planétaire. Les banques centrales, dont la mission affichée était de bloquer les hausses de prix à 2%,  sont obligées de réagir en tentant une limitation de la création monétaire : on relève les taux progressivement, ce qui vient limiter la valeur des anciens actifs figurant au bilan des banques. En effet, si les taux sur les nouvelles obligations sont plus élevés, il vaut mieux - pour les titulaires d’actifs anciens moins rémunérateurs - vendre et acheter de la nouvelle dette. Offre de titres anciens forte et demande inexistante, cela signifie une perte de la valeur du stock d’actifs dont le poids avait considérablement monté avec la politique d’argent facile. Il en résulte un déséquilibre du bilan des banques : les actifs se dévalorisent et le passif est gonflé par les comptes courants de tous les acteurs bénéficiaires de la dépense publique illimitée. En clair, les engagements (ce qui est sur un compte bancaire est une dette de la banque envers son client) deviennent plus importants que l’actif. De quoi se méfier, et pour les actionnaires des dites banques, et pour les clients…. D’où une baisse des cours et une possible panique des clients soucieux de mobiliser des avoirs qui risquent de s’évaporer.

4 - La baisse frappe les banques mais logiquement tous les actifs financiers directement ou indirectement rattachés. En particulier, les fonds indiciels (Exchange-traded funds) chargés de répliquer la performance du secteur bancaire voient leurs cours s’effondrer, ce qui entraine l’effondrement des titres reflétant plus largement les cours boursiers. D’où un risque d’évaporation d’une quantité considérable de capitaux à l’échelle mondiale.

5 - Les banques centrales sont d’abord soucieuses du maintien de l’ordre existant et donc, se prévalant de la gestions des crises financières antérieures, sont prêtes à payer le prix fort pour empêcher le développement de la crise. On apprend ainsi que les clients de Silicon Valley Bank, se trouvent complètement protégés par la garantie de la FED, laquelle va prêter de l’argent avec en garantie des titres financiers dont la valeur retenue est celle inscrite et non la valeur de marché. Un dispositif semblable risque de se mettre en place partout où le feu couve….

6 - Ce maintien de l’ordre existant est bien évidemment précaire puisqu’il correspond non pas à une nouvelle lutte contre une inflation qui ne faiblit pas mais à une possible accélération : le maintien de l’ordre existant passe par de nouvelles créations monétaires et au moins un arrêt de la hausse des taux. Cette création est aussi encouragée par la guerre qui suppose le passage de nombre d’Etats à une économie de guerre, laquelle se nourrit comme toujours de nouvelles dépenses publiques.

7- Les banques centrales sont ainsi en grande difficulté. Jusqu’ici le maintien de l’ordre existant était une inflation faible et des taux permettant le gavage de la finance ( des cours élevés sur les obligations) et les prodigieuses promesses de toutes les « Silicon Valley » du monde. Le modèle des banques centrales que l’on dit indépendantes est-il en péril ? Ne vont –elles pas, par la force des choses, amorcer un retour vers le modèle d’avant la financiarisation ? Ce qui supposerait  une révolution politique majeure. Affaire à suivre.

 

 

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