Le point fondamental de la reconstruction est un combat contre toutes les causes, les formes de déliaison sociale et de leurs effets collatéraux. Il s’agit d’une recherche de compétitivité globale, ennemi radical des « réformes structurelles » qui n’ont jusqu’ici fait qu’engendrer un mal être croissant entre les humains (creusement des inégalités, voire émergence de communautés antagonistes) d’une part, et entre ces derniers et le reste du vivant d’autre part.
Une compétitivité qui cesse d’être unidimensionnelle.
La compétitivité n’est plus un état fonction d’une seule variable, mais de la totalité des paramètres qui caractérisent un ensemble humain vivant dans un territoire lui-même en liaison avec d’autres territoires. Elle est faite du sens des autres, du souci du bleu contre le gris, de celui du chaleureux contre le froid, de l’humain contre le mécanique et l’automatique. Elle est certes faite de libertés fondamentales dont bien sûr la démocratie et la liberté d’entreprendre, mais elle est également faite de cohésion sociale, de respect des cultures, de respect de l’environnement[1], de respect des territoires extérieurs à ladite société et de leurs habitants, donc de respect des nations. La compétitivité totale n’est donc pas qu’une affaire de productivité du travail ou de taux de salaire[2].
Sortir du cadre…
Cette recherche de compétitivité globale passe par le point 2 de notre précédent texte[3] définissant les 5 blocs ou piliers de la reconstruction. Sans détailler, ces 5 piliers supposent de mobiliser des moyens à priori hors de portée dans le cadre des habituelles règles du jeu, règles plus ou moins reconduites dans le nouveau pacte de stabilité en cours de rédaction (Accord du 8 décembre entre Berlin et Paris). Quelque soit le bloc considéré, il n’est plus question de fixer les salaires selon la logique de la productivité marginale, mais d’abord sur leur contribution à la reconstruction du lien social. Ainsi le bloc instruction/éducation suppose une revalorisation massive des rémunérations d’une profession au cœur de la reconstruction[4]. Il en est probablement de même pour la plupart des acteurs des autres blocs : le travail manuel avec par exemple, dans le bloc environnement, l’isolement thermique des habitations ; le travail, dans le bloc santé avec par exemple celui des infirmiers et aides-soignants, etc. deviennent des priorités de la reconstruction et donc supposent des revalorisations massives des rémunérations correspondantes. Et donc des revalorisations permettant d’évacuer les faux débats sur les métiers en tension sauvés par une immigration illégale : la mauvaise image de certains métiers est d’abord provoquée par la faiblesse des rémunérations associées. Une mauvaise image peut s’effacer par le bais d’une rémunération plus attractive. Ce qui suppose un changement de paradigme économique.
Cette réorientation suppose donc une redéfinition des politiques publiques et redéfinition extrêmement gourmande en travail et en capital. Il est très difficile d’évaluer l’énormité des besoins, mais on peut toutefois avancer quelques chiffres impactant directement la dépense publique : probablement près de 10 milliards d’euros pour la formation, 33 milliards pour l’environnement selon le rapport Pisani Ferry, plusieurs milliards pour la santé, sans doute bien davantage pour l’énergie[5], et probablement plus de 10 milliards pour la défense nationale. Le total dépasse probablement la soixantaine de milliards chaque année dans un contexte à priori de baisse des recettes fiscales. Une baisse en raison de la chute de la productivité d’un capital plus coûteux (la protection de l’environnement est une dépense qui, pour l’essentiel, ne produit pas), et aussi de la chute des prélèvements fiscaux sur des énergies fossiles produites en moindres quantités. Ajoutons que beaucoup de ces dépenses ne seront jamais un capital avancé et restitué par une production. C’est le cas de l’environnement qu’on ne peut traiter dans le cadre d’une logique d’investissement impliquant un retour sur capital investi : non seulement un intérêt est impensable mais le remboursement du capital est tout aussi impensable. C’est également le cas des dépenses militaires qui ne font pas l’objet d’un échange marchand.
Il est donc évident que dans un tel contexte il n’est guère question d’en rester avec le présent modèle financier. Les dépenses publiques supplémentaires ne peuvent pas faire l’objet d’une dette mais d’un simple financement monétaire par la voie d’une banque centrale au service de la puissance publique, ce qui est interdit dans le TFUE. Construire un tissu social de qualité et sécurisé dans ses rapports avec d’autres mondes humains et le reste du vivant, suppose d’en finir radicalement avec le présent modèle financier.
Tout en respectant le travail comme mode de socialisation.
Dès lors comment sortir du carcan financier sans une rupture plus ou moins frontale avec l’UE et au-delà le reste du monde ? Au-delà des seules mobilisations de moyens financiers qui ne peuvent plus être dans une logique de marché, comment mobiliser les autres ressources et en particulier le travail ? Dans un tel contexte comment augmenter le taux d’activité seul susceptible de répondre aux immenses défis ? Plusieurs voies sont possibles. D’abord arrêter le subventionnement de la non activité et assurer, comme déjà indiqué, une rémunération beaucoup plus élevée pour tous les secteurs prioritaires (plusieurs millions d’emplois). Il faut ensuite mobiliser ceux qui seront progressivement invités à abandonner les secteurs ne contribuant pas à la productivité globale et qui souvent la freine, voire contribuent à sa destruction. A titre d’exemple les professions productrices d’une publicité abrutissante porteuse de la confection de l’individu isolé et simplement désirant, les branches d’activité ouvertement nuisibles telles celles concernant le faux marché de l’électricité avec sa bureaucratie et ses fournisseurs non producteurs et simplement capteurs de rentes, nombre des professions de la finance elles aussi simplement captatrice de rentes à partir de la matière première commune qu’est la monnaie, les gigantesques bureaucraties de marché, telles les autorités administratives indépendantes, les agences de contrôle et de notation, les activités en redondance et au service de l’industrie financière, etc. Il est difficile d’évaluer le nombre d’emplois inutiles ou destructeurs mais il s’agit probablement de plus d’un million. Ce grand chambardement sera aussi aidé par les nouvelles technologies productrices d’une taylorisation des activités dites intellectuelles (blockchain, IA, etc.) jusqu’ici, bien, voire trop rémunérées. Il aboutira en perspective à un resserrement de l’éventail des rémunérations, avec des professions qui, progressivement, cessent d’être méprisées et d’autres qui cessent d’être survalorisées.
L’augmentation du taux d’activité et le déplacement du travail depuis les espaces socialement improductifs vers ceux qui le sont davantage, supposent le réengagement d’une planification évoquée au point 5[6]. Toutefois, cette dernière n’est envisageable qu’après avoir résolu la question de la dé financiarisation. Il nous faut y revenir.
Le comment de la dé financiarisation
Le premier geste de la dé financiarisation concerne le marché primaire de la dette publique¸ Il n’appartient plus aux banques de créer de la monnaie pour acheter des bons du Trésor vendus par l’Agence France Trésor. Ce trop présent marché n’est plus éthiquement acceptable puisqu’il revient à concéder la puissance créatrice de la monnaie à des personnes privées qui vont - sans coût- utiliser cette puissance à leur profit et au détriment de la collectivité (le taux de l’intérêt). On ne peut utiliser la puissance de l’Etat pour le dépouiller[7]. Il faut donc décider qu’il n’y a plus à acheter de bons du Trésor sur un marché primaire et ordonner à la banque centrale elle-même de financer le Trésor, un geste supprimant l’Agence France Trésor devenue inutile. En termes concrets cela signifie l’abandon pour 2024 des charges publiques au titre du roulement de la dette actuelle (paiement des charges d’intérêt + paiement des bons parvenus à maturité + dette nouvelle au titre du déficit budgétaire). La somme correspondante se monte à 285 milliards d’euros et ira en decrescendo jusqu’à la disparition complète de la dette, soit compte tenue de la maturité actuelle (un peu moins de 7 ans) en 2030. Un tel geste n’affecte en aucune façon la liquidité bancaire puisque le Trésor continue de respecter ses engagements. Elle n’affecte pas non plus la rentabilité bancaire puisque les activités de collecte d’épargne et de crédits continuent de fonctionner. Mieux le coût de l’éviction par la gestion de la dette publique se trouve éliminé.
Ces ressources supplémentaires considérables, donc à la hauteur des enjeux, seront affectées à la reconstruction de la compétitivité globale, le mot d’ordre étant moins de finance et plus d’économie réelle.
D’abord une hausse sérieuse des rémunérations pour tous les emplois de première ligne et aussi les emplois affectés à l’environnement et au climat. Cette hausse s’opère sous financement direct s’agissant des emplois publics et assimilés. Elle s’opère ailleurs par financement indirect sous la forme de hausse des marges permettant à tous les métiers - en tension et à créer- de rémunérer correctement les collaborateurs. Il nous faudra détailler la démarche retenue afin d’en éviter les effets pervers. Cette hausse sérieuse prend pour appui les 285 milliards d’euros libérés par la disparition du marché de la dette publique.
Ensuite, il faut mettre en place une aide à la reconversion des emplois inutiles ou nuisibles. Une aide qui pourra partiellement s’autofinancer, par exemple par augmentation des taxes ou suppression des rentes sur les activités inutiles voire nuisibles, comme c’est la cas de nombre de prétendus fournisseurs d’électricité ou encore celui de nombre de métiers spécialisés dans la production du consentement à la sur consommation et au gaspillage ostentatoire (publicité). On ne peut plaider pour la sobriété et en même temps travailler à l’anormale et asociale suractivation de la dépense privée.
Rétrécissement du terrain de jeu de la finance et élargissement de celui de l’économie
Plus globalement, cette aide devra compenser les pertes de marché dues au processus de dé financiarisation. Il s’agit ici d’un axe majeur de la politique publique à retenir. Parce que l’industrie financière est de nature métastatique[8] elle est aussi devenue totalement disproportionnée ( Plus de dix fois le PIB du pays[9]) et engendreuse de chute de productivité globale, sous la forme de rentes, de spéculations ruineuses, d’optimisation de gestion de fonds propres sur base spéculative, de transferts de risques très risqués, de création d’actifs dépourvus de sous-jacents, de bulles, le tout entrainant une confusion totale entre l’acte d’investir ( préparer l’avenir) et l’acte spéculatif (consommer le présent), avec les comportements opportunistes qui s’y rattachent et donc un creusement sans aucune limite des inégalités sociales. Parce que l’édifice financier est devenu gigantesque, opaque et très dangereux il est clair qu’il faut proposer une politique prudente de réduction progressive de son périmètre, ce qui facilitera le transfert progressif de très nombreux, très compétents, et probablement très honnêtes professionnels vers des activités utiles. Pensons par exemple à cette multitude d’ingénieurs qui maitrisant déjà la digitalisation financière serait bienvenue dans la construction des usines 4.0 issues de « l’Evolutive Facility »(EVF) qui se déploient dans toutes les industries et génèrent des sauts très importants de productivité. Des dizaines de milliers d’emplois gaspillés dans la finance font aujourd’hui cruellement défaut aux entreprises industrielles engagées dans la digitalisation des process et les indispensables « jumeaux numériques ». La finance automatisée mobilise largement le même type de compétences que les futures « dark plants »[10]. Bien évidemment il ne s’agit pas de supprimer totalement les métiers de la finance, il s’agit simplement de les contenir et de les réserver à ce qui est directement branché sur l’avenir, donc l’investissement réel. On peut ainsi comprendre, dans certaines limites, le capital-risque, le private equity, les fonds de pension, etc. Par contre il faudra être sélectif et sévère avec les fonds alternatifs et autres hedge funds.
Déjà la fin de la dette publique est une réduction considérable du périmètre de la finance puisque cette dette est la matière première de base des jeux financiers. L’actif sécurisé « bon du Trésor » étant, dans le modèle proposé, en voie de disparition, il va considérablement manquer dans la couverture des transferts de risques, ce qui va en augmenter le coût qui lui-même va automatiquement limiter le périmètre des activités correspondantes. Spéculer, transférer des risques, doivent devenir trop coûteux et le deviendront réellement avec la disparition du marché primaire de la dette publique. Signalons qu'ils le sont déjà avec la guerre en Ukraine qui a entrainé un supplément de volatilité et une surconsommation de dette publique (jusqu'à 80% d'une position selon la banque de France) au titre de l'appel de marge dans les systèmes de compensation. (
Au-delà il faut compenser les restrictions de jeux financiers et couvrir tout ce qui doit correspondre à la sécurisation des activités : contrôle des changes et encadrement de la circulation du capital, fin de l’explosive innovation financière, fin des cryptomonnaies et possible monnaie digitale de banque centrale, limites à la spéculation sur toutes les matières premières, limites à la grande mode du « reporting ESG », limites à la financiarisation de l’extra financier, interdiction des rachats d’actions, etc.
Une façon commode de compenser les restrictions de jeux est par exemple de limiter progressivement les activités de couverture et de financer les déboires correspondants des entreprises à partir des ressources autorisées par la fin de la dette publique. Par exemple si une compagnie aérienne ne peut plus se couvrir à terme sur le coût du kérozène et qu’elle enregistre un manque à gagner, il y aura compensation - encore une fois à partit des ressources engendrées par la fin de la dette publique - selon des règles à définir. Ces régimes de compensation au titre d’une réduction du périmètre de la finance doivent être mis en place progressivement. La conséquence est aussi la réduction des bulles sur tous les intrants et donc une sécurisation plus grande de l’activité économique réelle. L’idéal serait d’assécher le gigantesque marché des changes, gaspilleur de ressources et d’en revenir à des taux de change fixes avec comme conséquences l’effondrement de la volatilité[11] sur tous les intrants. Là encore la disparition de la dette publique sera un puissant outil d’étranglement des marchés financiers.
Le rétrécissement du périmètre de la finance est bien sûr un redéploiement de l’activité économique vers d’avantage d’auto centrage. De la même façon l’affaissement de la finance devrait également permettre la fin du démantèlement sans limite des entreprises classiques. Ces dernières ne faisant plus que répondre aux exigences d’une finance voulant mesurer la compétitivité de chaque composante voire de chaque service[12]. D’où l’accélération des opérations de découpage pour améliorer la valorisation, la somme des parties valant financièrement plus que le tout. Le rétrécissement du périmètre de la finance sera donc aussi la réduction de la pression sur les entreprises et la réduction consécutive des métiers parasitaires qui ont participé aux catastrophiques révolutions managériales. Pensons par exemple à la gestion des grands groupes d’EHPAD.
Le grand redéploiement doit aussi être accéléré par la réduction de toute la normalisation au service de la finance actuelle et la promotion de nouvelles beaucoup moins nombreuses. Par exemple celles consacrées à la limitation de la mondialisation. Ainsi il faut imaginer un ratio limite pour les contenus en importations des produits et services mis sur le marché. Son non-respect pouvant entrainer des sanctions par exemple sous la forme de limitation des mesures financières de compensation.
Le contrôle des effets pervers de la grande transformation.
Si la grande transformation ne correspond pas à une véritable inflation monétaire - ce que l’orthodoxie appelle la « planche à billets » - il reste quand même une difficulté. En effet la disparition du marché de la dette publique et la mise à disposition des moyens correspondants par la banque centrale est possiblement déséquilibrée en raison du fait que dans le marché actuel il est difficile d’identifier, dans la matière première, c’est-à-dire la monnaie servant aux achats des banques, ce qui correspond à une épargne, et ce qui, à l’inverse, correspond à une création monétaire pure. C’est la raison pour laquelle la banque centrale devra veiller à ce que sa création monétaire soit significativement inférieure – à priori le volume d’épargne utilisée aujourd’hui par les banques- au montant des sommes prévues dans les adjudications de l’actuelle Agence France Trésor. Si la banque centrale cesse d’une façon ou d’une autre d’être indépendante il lui faudra quand même assurer le contrôle de l’inflation et donc veiller au contrôle du flux de monnaie vers l’Etat.
Au-delà, l’un des tous premiers effets du chambardement proposé est évidemment une élévation de la consommation impulsée par la hausse des rémunérations. Certes les rémunérations stratosphériques, plus particulièrement présentes aujourd’hui dans la sphère financière, deviennent mécaniquement plus limitées avec la limitation du terrain de jeu de la finance. De la même façon ces rémunérations en voie d’étranglement progressif ne nourriront plus une épargne alimentant elle-même la spéculation sur les titres et l’immobilier, et donc une inflation sur les actifs financiers et immobiliers. Le grand chambardement proposé est donc moins d’épargne des riches nourrissant, par déversement, des bulles spéculatives. Il est donc aussi un combat contre la déformation des revenus globaux de plus en plus issus d’activités spéculatives et rentières et apparaissant de moins en moins comme la rétribution d’un travail ou d’un investissement.
Toutefois les hausses de rémunérations sur la foule des emplois de première ligne risquent de peser sur les importations et sur les prix. C’est la raison pour laquelle toutes les mesures de compensations doivent devenir autant d’incitations visant un large processus de relocalisation progressive des activités. D’où l’idée d’une surveillance très étroite du contenu importé de toutes les activités. Avec, si possible, au-delà du processus de compensation, un système d’aides à toutes les substitutions d’importations. On le voit, des réformes structurelles d’une toute autre nature que celles encore envisagées aujourd’hui. L’objectif n’est plus la maximisation d’un PIB comme effet d’une maximisation de la productivité et d’une compétitivité mal assise, mais un auto centrage maximal des activités comme condition nécessaire d’une compétitivité globale.
Peut-on rassembler et mobiliser les outils du projet de grande transformation ?
Le premier outil est bien évidemment la banque centrale. Peut-on contourner les textes en vigueur sans une dénonciation globale impliquant elle-même la fin de la présente architecture européenne ? Peut-on simplement invoquer une situation exceptionnelle correspondant aux gigantesques contraintes actuelles en matière climatique et environnementale ? Une façon de procéder serait d’appuyer fortement et sans doute de déformer le projet de Monnaie Digitale de Banque Centrale imaginé par la BCE[13]. Négocier sur le périmètre des porte monnaies électroniques et imaginer l’un d’entre- eux porté par les Etats serait une porte d’entrée pour, si possible, aller beaucoup plus loin.
Le second outil correspond au non-respect des règles du grand marché gravement attaqué par les modalités retenues de la dé financiarisation. Cet outil est sans doute plus facilement contournable et l’expérience du marché unique et ses nombreuses dérogations peut laisser un espoir.
Le troisième outil - et de loin le plus important - est celui de la formation du personnel politico administratif qui serait le porteur du projet. Si les campagnes électorales n’abordent jamais – strictement jamais, aussi bien en France qu’à l’étranger - les questions financières, c’est sans doute en raison de la difficulté technique et du caractère sensible du problème. La finance est enfouie dans l’Etat profond et aucun parti politique n’a jusqu’ici abordé ces questions très mal maitrisées. Aucun n’est prêt aujourd’hui à l’aborder. Seule la connaissance approfondie de l’industrie financière - une connaissance pas toujours maitrisée par les professionnels eux-mêmes – permettra de comprendre la nécessité de revoir l’architecture financière et la réglementation européenne correspondante. Elle permettra également de concevoir les politiques publiques les plus adaptées à la reconstruction du pays. Dans le cadre d’une campagne électorale il est donc urgent de maitriser les questions techniques liées aux arguments faciles et démagogiques de l’Etat profond et de la population culturellement éloignée qui s’y trouve embrigadée. Il faut donc être intellectuellement équipé pour répondre aux arguments de l’apocalypse type : « planche à billets », « inflation », « Assignats » « ruine des épargnants », « fuite des capitaux », etc.
Nous tenterons de publier prochainement un papier de réflexion sur la réaction des marchés et sur les stratégies retenues par la finance mondiale dans ce qui sera son combat pour empêcher, voire ruiner, toute tentative de grand chambardement.
[1] Un environnement déjà perçu par Günther Anders - bien avant le mouvement écologiste d’aujourd’hui - comme dominé par l’homme et qu’il qualifiait par une expression forte : « le prolétariat cosmique ». Cf son ouvrage : L’humain étranger au monde ; Editions Fario ; 2023.
[2] De ce point de vue la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) applicable dès janvier 2024 n’apporte que peu de choses en termes de productivité globale. Outre sa mise en œuvre très complexe, elle évoque plus les questions environnementales que la qualité du lien social. La mise en place administrativement coûteuse développera la suspicion à bien des étages de l’entreprise et de son environnement, entreprise encore davantage exposée à la surveillance financière. Soulignons enfin que la CSRD est aussi un gigantesque marché pour nombre de cabinets de consultants : une véritable aubaine. Il est vrai que la directive liste 1178 indicateurs potentiels....
[3] http://www.lacrisedesannees2010.com/2023/12/le-socle-de-tout-programme-electoral-serieux.html
[4] L’investissement dans la formation est fondamental. Voir à ce propos, l’ouvrage de Xavier Jaravel : « Marie Curie habite dans le Morbihan » ; Seuil ; 2023. En 2022, sur 1.000 euros de prélèvements obligatoires, environ 560 ont financé la protection sociale, avec en premiers postes les retraites et la santé, tirés par le vieillissement de la population. Seulement 90 euros vont à l'enseignement, un montant en baisse de 14% en trente ans.
[5] Ne mentionnons qu’un seul chiffre : on parle de la création de réseaux pour les énergies renouvelables, ce qui d’après le Think tank « Confrontations Europe » suppose un investissement de près de 600 milliards d’euros d’ici 2030 pour le continent européen, et donc probablement quelque 10 milliards annuellement pour la France.
[6] http://www.lacrisedesannees2010.com/2023/12/le-socle-de-tout-programme-electoral-serieux.html
[7] Cela ne signifie pas nécessairement le passage au « 100% monnaie », c’est-à-dire une capacité à prêter reposant sur des dépôts à hauteur de 100%. Ce point de vue était celui de Maurice Allais de Milton Friedman et avant eux d’irving Fisher. Mais cela ne signifie pas non plus qu’un projet politique de dé financiarisation exclue cette possibilité.
[8] http://www.lacrisedesannees2010.com/2023/10/reconstruire-le-systeme-bancaire.html
[9] Sur la construction du tsunami financier on pourra lire : « l’esprit malin du capitalisme » ; Yves Gomez ; Desclée De Brouwer ; 2010. Ouvrage plus récent, on pourra lire : « Quelle Economie Politique pour la France » ; Yves Perrier et François Eswald ; l’Observatoire ; 2023.
[10] Usines automatisées fonctionnant largement sans opérateurs.
[11] La rentabilité de ce qu’on appelle les « desk matières premières » est d’autant plus élevée pour la finance que la volatilité est forte. Cette volatilité élevée est à l’inverse une gène pour l’économie réelle. Réduire le marché de la finance est donc un avantage pour l’économie.
[12] D’où une surveillance rigoureuse de la finance sur les choix des entreprises dans l’arbitrage entre le « make » et le « buy ». Avec toutes ses conséquences en termes de management, c’est -à dire la fin de « l’ére des organisateurs » chère à Burnham au profit des cadres dévalorisés arrimés à la culture du reporting.
[13]http://www.lacrisedesannees2010.com/2023/10/reconstruire-le-systeme-bancaire.html