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6 novembre 2013 3 06 /11 /novembre /2013 23:00

                          

Dans « Mondialisation : l’aventure étatique est loin de s’achever » nous avons évoqué les trois grandes  formes de décomposition/recomposition des Etats. Dans ce cadre, nous avons traité de façon simplement allusive, ce que nous appelions les « structures conglomérales pré modernes ».

Le présent texte propose de donner davantage de contenu à ce type de structures.

Le fait fondamental est qu’elles n’ont pas connu l’étape de l’Etat-Nation, étape directement issue de la spécificité de l’histoire européenne. Clairement elles n’ont pas connu l’accouchement du système « westphalien » et ne l’ont rencontré que sous l’angle d’une copie (reproduction) ou d’une imposition : empire des Tsars devenant URSS, empire Ottoman découpé par les puissances occidentales, Etats africains multi- ethniques et/ou multi -confessionnels, etc.

Décodé ou extirpé de son enveloppe idéologique, le système westphalien correspondait à un équilibre des forces entre  entrepreneurs politiques prédateurs en concurrence au sein d’un espace. Il s’agissait de créer des monopoles incontestables garantis par l’idée d’un équilibre des puissances, l’inviolabilité de la souveraineté (c’est-à-dire un principe qui consacre un monopole de prédation au profit d’entrepreneurs politiques d’un espace délimité par des frontières elles- mêmes inviolables),  et bien-sûr ce droit complémentaire qui est celui de la non- ingérence.

Ce modèle officiellement né avec les traités de Westphalie (1648) allait renforcer et légitimer  une dynamique déjà en cours : naissance d’un droit international, renforcement de l’idéologie d’un intérêt général par imposition de mesures d’homogénéisation des populations, désormais solidement campées et identifiées à l’intérieur de frontières par les entrepreneurs politiques locaux. A partir du système westphalien pourra se renforcer,  ce que les juristes appellent,  la construction de l’Etat moderne : religion d’Etat, imposition d’une langue, invention d’un mythe national, imposition d’un système de mesures, d’une monnaie, d’une armée de métier, etc. Bref tout ce que les économistes fonctionnalistes appellent improprement la « construction des biens publics ».  ( Alesina A, E. Spolaore (« The size of Nations »,Cambridge,The MIT Press, 2003), JM Siröen (“Globalisation et Gouvernance; une approche par les biens publics », dans  « Crise de de l’Etat, Revanche des Sociétés ». Montréal, Athéna Editions, 2006), etc.).

 Mieux, parce que désormais sédentarisés et protégés par des frontières, les entrepreneurs politiques pourront progressivement devenir de bons gestionnaires de leur monopole, ce qu’on appelle par exemple « le mercantilisme des monarchies européennes ». Mercantilisme devenant une confirmation empirique de ce qui est pourtant l’erreur du fonctionnalisme économiciste : les entrepreneurs politiques, animés par des intérêts privés : recherche de pouvoirs réels ou symboliques, de rentes, etc. ne sont pas les guides intelligents et altruistes, voire des « héros » conduisant à un intérêt général.

Bien évidemment la stabilité est toute relative. La souveraineté est une garantie qui connait hélas une contrepartie, à savoir l’impossibilité de gérer par le droit les externalités qu’elle peut engendrer. Alors que dans un Etat, un Code Civil peut sanctionner les externalités produites par les citoyens, dans l’ordre de la souveraineté rien ne peut gérer ce type de circonstances : l’ordre westphalien ne peut mettre fin à des guerres qui seront de plus en plus des guerres entre Etats- Nations. C’est dire que l’aventure étatique n’est pas gelée dans ce système et qu’à l’inverse, les Etats pourront se déplacer, se réduire, s’agrandir, se multiplier, se diviser, etc. (300 Etats européens en 1789 et seulement 25 en 1914 ; A l’échelle planétaire 53 Etats en 1914, mais 197 en 2012).

La première mondialisation sera aussi un vecteur d’exportation du modèle wespthalien. Une exportation qui sera  une adaptation plus ou moins violente : des entrepreneurs politiques extérieurs au système vont se l’approprier. Surtout, la colonisation, puis la décolonisation vont l’imposer partout dans le monde au 19ième siècle et plus encore au vingtième.

Toutefois, cette exportation souvent tardive, ne correspondra pas à une  greffe de qualité. La raison en est que l’homogénéisation est un processus de très longue durée et qu’à ce titre, il est difficile voire impossible de connaitre des raccourcis, ou très difficile voire impossible de s’aventurer dans des schémas qui correspondent aussi à des milieux culturels différents. Il sera par exemple très difficile de faire cohabiter  - parce que fusion  historiquement impossible – nationalité et citoyenneté (Empire autrichien), très difficile d’englober des peuples visiblement différents (Russie), très difficile de faire naitre des frontières westphaliennes là où elles n’ont aucune légitimité (Empire Ottoman, Afrique), etc.

 Parce que ces structures n’avaient pas la qualité d’Etats-Nations, elles se révèlent beaucoup plus fragiles que les vieux Etats-Nations westphaliens au moment où  l’inondation économique va s’annoncer. Les entrepreneurs politiques locaux, n’ont pas eu le temps de passer par la phase mercantiliste, qui devait générer les biens publics assurant la cohésion de l’ensemble. Et il est vrai que ces derniers étaient sans doute plus difficiles à construire, car réducteurs d’hétérogénéité donc de résistance voire de violence sociale, ce qu’ Alesina et Spolaore appellent les « coûts d’hétérogénéité » ( « Economic Intégration and Political Disintégration », 2000, American Economic Review, vol,90,p.1276-96).  Si maintenant les entrepreneurs politiques de ces structures sont invités par effet de mimétisme à reproduire formellement les schémas démocratiques, la tendance à la dislocation s’accroit. Une tendance qui par effet de boucle aggrave les coûts d’hétérogénéité et renforce la fragmentation. JM Siroën (« L’Etat-Nation survivra-t-il à la mondialisation » dans « La Question Politique en Economie Internationale », Paris, La Découverte, 2006) souligne ainsi que les coûts d’hétérogénéité sont plus lourds pour la Bosnie qu’ils ne l’étaient pour la Yougoslavie et probablement pour l’Autriche. De la même façon les Lettons n’étaient qu’un élément d’hétérogénéité marginale pour l’URSS, alors que la minorité russe de Lettonie devient un élément important pour cette dernière entité. Que serait aussi le coût de cette « sous- nationalité » (territoire de Bruxelles) dans une Belgique démantelée ? On pourrait étendre le raisonnement au Moyen Orient et à une partie de l’Afrique.

Il est ainsi probable que le souffle de la mondialisation sur des structures en voie de fragmentation développe d’énormes difficultés.

Ces structures sont nombreuses. « Foreign Policy » en dénombre 20, identifiées sur la base de 12 critères, constituant des indices de décomposition. Cela signifierait aujourd’hui, que 10% des acteurs étatiques sont des « failed States » dont la majorité se trouve sur le continent africain. Parce que structures en décomposition, ne pouvant pas atteindre ou reconstruire la phase mercantiliste de l’aventure étatique, celle des biens publics, les entrepreneurs politiques locaux sont dans l’incapacité d’accéder à une quelconque légitimité, d’où des guerres internes. La fin du modèle Etat-nation correspond ainsi à un déplacement des théâtres guerriers : relative disparition des guerres entre démocraties du système westphalien, donc guerres entre nations, et énorme développement des guerres intra-étatiques. Ainsi, selon la revue de l’Ifri (« Politique étrangère »), sur 164 guerres intervenues depuis 1945, 126 relèvent de cette dernière catégorie.

La mondialisation, avec la fin des Etats-nations classiques et la multiplication d’acteurs politiques indépendants, renforce la décomposition : il est difficile de faire émerger une politique de « State-building » c’est-à-dire une force collective de recomposition des « failed States », et dans le même temps, l’entrepreneuriat politique de ces derniers Etats, peut trouver avantage dans la prédation directe sur la mondialisation elle-même. Il s’agit là du retour aux structures archaïques des Etats avec la réapparition du « roving bandit » (le bandit vagabond que l’on oppose au bandit stationnaire à l’origine de structures étatiques plus stables) bien analysé par Olson ( Power end Prosperity, Basic Books, 2000) que l’on voit renaitre en Somalie, dans le ventre de l’Afrique, voire plus récemment à Madagascar (Hervé Juvin).

Dans la vision économique traditionnelle, Internet, finance dérégulée et container normalisé, peuvent plus ou moins apparaitre  comme biens publics désormais mondiaux. Dans le langage de ce blog ils sont désignés par l’expression « Autoroutes de la mondialisation » autoroutes issues d’une interaction sociale complexe ayant débouché sur leur construction. Ces infrastructures lourdes sont bien sûr « vampirisables » par des acteurs privés (manipulation du LIBOR, de l’EURIBOR, du FOREX, etc. ). Elles le sont bien sûr aussi par de vieux Etats-Nations ou leurs représentants (privilège du dollar comme monnaie mondiale, privilège de la City de Londres, paradis fiscaux, etc.).  De plus en plus, elles le sont aussi par les entrepreneurs politiques issus de vieux Etats non parvenus jusqu’ici, au stade de l’Etat de droit, ou plus récemment par ceux des « Failed States ». A chaque fois il s’agit d’une prédation de plus en plus directement lisible dans la réalité sociale.

Les prélèvements fiscaux de l’Etat de droit sont bien un non- respect de la propriété, mais celui-ci est compensé par une redistribution entre les acteurs, d’où l’idée que l’idéologie de l’intérêt général peut encore être plus ou moins crédible dans un système où la démocratie peut finalement permettre une inter-action sociale plus ou moins équitable : tout le monde peut voler tout le monde par un jeu complexe de prélèvements, de subventions, de services publics, de textes clientélistes, etc. Le passage insensible au " vote privatif" cher à Luc Rouban ("Du vote de classe au vote privatif", Cevipof, octobre 2013) viendrait plutôt confirmer ce point de vue.

Si La mondialisation fait davantage apparaitre la réalité par la gigantesque manipulation prédatrice des autoroutes de la finance ( scandale du LIBOR par exemple), elle peut encore trouver un minimum de crédibilité, et les régulateurs peuvent théoriquement sanctionner les manquements à ce qui peut encore apparaitre comme des règles du jeu social.

Les choses s’aggravent pourtant si la mondialisation génère des espaces de plus en plus larges peuplés de « Failed States » eux- mêmes à cheval sur les autoroutes de la mondialisation. Ici la prédation apparait directement visible, sous la forme d’entrepreneurs politiques qui nous ramènent à des époques pré mercantilistes, celles que Marx taxaient de périodes « d’accumulation primitive du capital ».

 L’expérience de la grande crise depuis 2007 nous révèle, que ce qui reste encore la communauté des Etats- Nations, se trouve dans une grande incapacité à instituer de l’ordre dans la partie financière des autoroutes de la mondialisation. Dès lors, comment imaginer une politique internationale sérieuse de construction ou reconstruction des « Failed States » ? La décomposition est ainsi appelée à s’étendre. Cruel retour au moment Hobbésien.

 

 

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commentaires

B
Andrew Huszar est un membre de Rutgers Business Schools, ancien gérant de Morgan Stanley. Entre 2009 et 2010, il a géré le programme de rachat d’obligations douteuses de 1 250 milliards de dollars<br /> de la Réserve Fédérale Américaine. A propos du Quantitative Easing (QE), il écrit que la banque centrale des Etats-Unis achète chaque mois 85 milliards de dollars d’obligations :<br /> <br /> - 45 milliards de dollars d’obligations de l’Etat US<br /> <br /> - 40 milliards de dollars de titres adossés à des crédits hypothécaires immobiliers.<br /> <br /> http://www.les-crises.fr/confessions-quantitative-easer/<br /> <br /> La Fed possède une machine à faire des bulles. La Fed souffle, souffle, souffle, et elle crée des bulles, notamment des gigantesques bulles obligataires.<br /> <br /> Il y a une gigantesque bulle obligataire aux Etats-Unis. La dette publique des Etats-Unis est de 17 140 milliards de dollars.<br /> <br /> Il y a des gigantesques bulles obligataires en Europe. La dette publique des 28 Etats de l’Union européenne est de 11 280 milliards d’euros, soit 15 166 milliards de dollars.<br /> <br /> Il y a une gigantesque bulle obligataire au Japon. Fin septembre 2013, la dette publique du Japon a atteint 1 011 200 milliards de yens, soit 10 300 milliards de dollars. D’après le FMI, en 2014,<br /> la dette publique du Japon sera de 242,3 % du PIB.<br /> <br /> Quand ces gigantesques bulles obligataires éclateront, tous ces pays connaîtront un effondrement économique et financier.<br /> <br /> Ce sera le temps des saignées.<br /> <br /> Le livre de l’année 2013 : « La grande saignée » de François Morin.<br /> <br /> http://www.placedeslibraires.fr/detaillivre.php?gencod=9782895961734
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B
François Morin est agrégé, puis docteur d'Etat en sciences économiques. Il est professeur émérite de sciences économiques à l'université Toulouse 1.<br /> <br /> Il a été membre du Conseil général de la Banque de France, consultant international auprès de l'Organisation des Nations Unies, censeur de l'Institut régional du développement industriel, membre du<br /> Comité national des universités, administrateur d'Aérospatiale, membre du Conseil d'Analyse Economique.<br /> <br /> Le 6 septembre 2006, il avait publié un livre qui annonçait la crise des subprime : « Le nouveau mur de l'argent ; essai sur la finance globalisée ». Mais en septembre 2006, tout le monde s’en<br /> foutait. La presse n’en avait pas parlé.<br /> <br /> Sept ans plus tard, le 3 octobre 2013, il publie un livre qui annonce un énorme cataclysme financier : « La grande saignée ; contre le cataclysme financier à venir ».<br /> <br /> Dans ce livre, il écrit que les défauts de paiement des Etats européens vont provoquer la faillite des sociétés d’assurance et la faillite des banques européennes.<br /> <br /> Mais là encore, tout le monde s’en fout.<br /> <br /> François Morin : « Je pense que cette crise sera épouvantable. Elle va tout déstabiliser, avec les conséquences dramatiques que l'on peut imaginer. Il peut en sortir Roosevelt ou Hitler. C'est pour<br /> cela que mon dernier livre appelle à lutter «contre le cataclysme financier à venir». Dans cet univers dévasté, la nationalisation des banques sera le seul trait de lumière et permettra d'effacer<br /> une grande partie des dettes. Et, entre autres, d'envisager sérieusement le financement à long terme de la transition énergétique. »<br /> <br /> http://www.marianne.net/La-crise-qui-vient-sera-epouvantable_a233567.html
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J
<br /> <br /> J'ai lu le livre, il est excellent de précision et de clarté. Livre à conseiller.<br /> <br /> <br /> <br />
B
Concrètement, comment vont se dérouler les "saignées" en Europe ?<br /> <br /> 1- D'abord, une dizaine de pays européens vont se déclarer en défaut de paiement, les uns après les autres. Les gigantesques bulles obligataires européennes éclateront.<br /> <br /> 2- L'éclatement de ces bulles obligataires va provoquer :<br /> <br /> - la disparition des retraites par capitalisation (massivement placées en obligations d'Etat)<br /> <br /> - la disparition de l'assurance-vie (massivement placée en obligations d'Etat)<br /> <br /> - la faillite des banques (massivement détentrices d'obligations d'Etat)<br /> <br /> - la faillite des sociétés d'assurances (massivement détentrices d'obligations d'Etat), etc, etc.<br /> <br /> 3- Nous entrerons dans une période de chaos. Les Etats européens seront incapables de sauver de la faillite les banques européennes, contrairement à ce qui s'était passé en septembre 2008. Les<br /> Etats européens ne pourront que contempler le spectacle. Ils seront des spectateurs impuissants.<br /> <br /> 4- La BCE injectera des centaines de milliards de liquidités, mais ce sera inefficace. Les banques arrêteront de prêter le moindre euro aux particuliers et aux entreprises privées. Les banques<br /> essaieront de sauver les meubles en replaçant aussitôt les crédits octroyés par la BCE dans leur compte de réserves auprès de la BCE.<br /> <br /> 5- Les épargnants se précipiteront vers les distributeurs automatiques de billets, mais ils ne pourront pas retirer d'argent. Les guichets des banques seront fermés. Les sites internet des banques<br /> seront fermés eux-aussi.<br /> <br /> 6- Les épargnants se tourneront vers leur Etat. Ils demanderont à leur Etat le remboursement de leur épargne (100 000 euros maximum, en théorie). Mais en pratique, les Etats européens seront<br /> incapables de rembourser l'épargne volatilisée des épargnants.<br /> <br /> 7- Il y aura un effondrement des Bourses.<br /> <br /> 8- Les banques européennes seront en faillite, la BCE sera en faillite. Les rentiers, les actionnaires, les épargnants et les retraités européens auront tout perdu. Ils seront en colère. Les foules<br /> en colère chercheront des boucs émissaires. Après le chaos financier, il y aura le chaos social et le chaos politique.
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H
Les quatre derniers paragraphes sont bien courts pour l'ampleur du sujet abordé qui touche aux fondements mêmes du Contrat Social dans toute civilisation:<br /> <br /> "Les prélèvements fiscaux de l’Etat de droit sont bien un non- respect de la propriété, mais celui-ci est compensé par une redistribution..."<br /> <br /> Mais qu'est-ce après tout que la propriété elle-même dans une société, sinon le résultat d'échanges impliquant un apport de chacun (travail, capital, ou troc, etc.) et où l'évaluation tient de la<br /> convention implicite par Contrat:<br /> tout ce qui n'est pas interdit est permis!<br /> <br /> Il en va ainsi de la "gigantesque manipulation prédatrice des autoroutes de la finance" qu'il est à peine question de réguler... Le terme "régulation" qui s'emploie pour l'écoulement d'un flux (et<br /> qui vient de "régulier")est d'ailleurs symptomatique: on évite le terme plus impératif de "règlementation" (qui vient de "règle")!<br /> <br /> Quand les LTRO (long term refinancig operations) de Mario Draghi contribuent à alimenter les profits bancaires et les bulles spéculatives, ce n’est pas pour surprendre puisque l’homme de Goldman<br /> Sachs ne fera évidemment rien qui puisse gêner les banques... ce qui est un euphémisme.<br /> Mais il ne fait après tout qu'exploiter les impasses de "règlementation" de la BCE qui oblige en toutes circonstances à passer par la monétisation indirecte, via le marché secondaire, faisant<br /> croître et exploser toutes les bulles spéculatives des banques !<br /> Quoi de surprenant puisque le système a été conçu par des banquiers ?<br /> <br /> Le plus désolant avec les banquiers, c’est que leur connaissance de ces turpitudes et de leur danger, même chez les mieux disposés à les dénoncer, ne semble en rien les inciter à s’en affranchir<br /> vraiment.<br /> Témoin, encore une fois, le livre cité de JM Naulot « Crise financière » aux deux sous-titres évocateurs « Pourquoi les gouvernements ne font rien » et « Un banquier sort du silence » qui semble<br /> émouvoir les médias :<br /> http://www.dailymotion.com/video/x15j60k_jean-michel-naulot-la-colere-d-un-ancien-banquier-04-10-2013_news<br /> <br /> Au sujet de l’Union bancaire, l’auteur décrit avec lucidité :<br /> Comment « FAIRE PAYER LES INVESTISSEURS, LES ÉPARGNANTS ET LES CONTRIBUABLES » :<br /> « Aller chercher un soutien du côté des investisseurs et des épargnants, en quelque sorte le renouvellement des négociations grecques à grande échelle…<br /> Les conditions très strictes posées par Mario Draghi à l’intervention de la BCE pourraient être le signe d’un dessein caché:<br /> Pour assurer le sauvetage de la Grèce sans avoir à déclarer officiellement son défaut, la BCE avait eu recours à un habile procédé qui consistait à organiser un échange « volontaire » de titres<br /> souverains, réservé aux investisseurs privés sur la base d’une très forte décote.<br /> Cette fois, les clauses seront là, plus besoin d’artifices d’échange « volontaire ». La dette ordinaire aura vocation à être restructurée dès lors que la BCE le décidera. On peut penser qu’il<br /> suffira que la Troïka se mette d’accord avec les<br /> banques pour que les retstructurations s’imposent à tous. Et l’on voit mal comment la BCE ne pourrait pas se mettre d’accord avec les banques puisqu’elle les finance…<br /> L’euthanasie du rentier (par l’intérêt inférieur à l’inflation) que décrit Keynes serait bien douce à côté de celle-ci. Cette fois, ce n’est pas la rémunération de l’épargne qui serait faible, mais<br /> le capital qui serait entamé, celui des investisseurs et à travers eux celui des épargnants.<br /> Cette méthode de « résolution » des crises est une bien mauvaise idée. Cette évolution serait d’autant moins bien acceptée que la situation des pays de la zone euro était au commencement de la<br /> crise de la monnaie unique beaucoup moins dégradée que celle de pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni ou le Japon.<br /> L’austérité aura freiné les rentrées fiscales et creusé les déficits que l’on cherche à rééquilibrer par davantage d’austérité… »<br /> <br /> Ce sont là des conclusions évidentes dignes des « économistes atterrés » !<br /> Pourtant, que croyez-vous que recommande l’auteur, en conclusion, comme nouvelles résolutions dignes de ce nom? Uniquement des mesures à caractère conservatoire (préfixe RE) simplement ou<br /> quantitatif (PLUS):<br /> - REndre plus transparents, PLUS sûrs et PLUS coûteux, les produits dérivés<br /> - RÉduire l’emprise des financiers sur les matières premières<br /> - Un système bancaire PLUS solide<br /> - Une distribution du crédit PLUS équitable<br /> - REmettre les banques au service de l’économie réelle<br /> - Des agences de notation REmises à leur vraie place<br /> etc.<br /> C’est du Georges Ugeux tout craché (cf « La trahison de la finance ») !<br /> <br /> La question est bien celle du "cruel retour au moment Hobbésien" qu'on souhaiterait plutôt être celui du moment Rousseauiste où l'on se pose la question cruciale du contenu du contrat et du statut<br /> de ses rédacteurs.<br /> <br /> Si les États de l'UE font bien partie des "États effondrés dans la mondialisation" et veulent rebâtir ensemble un nouveau Contrat, il faudra bien faire appel au citoyen pour lui demander ce qu'il<br /> souhaite de manière plus respectueuse qu'en 2005.<br /> Plus que jamais, les efforts d'Etienne Chouard seront à l'ordre du jour !<br /> http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/
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B
Le Japon, les Etats-Unis, et une dizaine de pays européens vont se déclarer en défaut de paiement. Ce genre de "saignées" est un grand classique dans l'Histoire du monde : il y en a déjà eu des<br /> centaines.<br /> <br /> Quand ces "saignées" vont se produire, il y aura le chaos.<br /> <br /> L’éclatement de ces bulles obligataires va créer le chaos dans les pays occidentaux, avec notamment :<br /> <br /> - la disparition des retraites par capitalisation (massivement placées en obligations d'Etat)<br /> <br /> - la disparition de l'assurance-vie (massivement placée en obligations d'Etat)<br /> <br /> - la faillite des banques (massivement détentrices d'obligations d'Etat)<br /> <br /> - la faillite des sociétés d'assurances (massivement détentrices d'obligations d'Etat), etc, etc.<br /> <br /> Pour savoir dans quels pays européens auront lieu ces "saignées", voici les chiffres de la fin juin 2013 :<br /> <br /> 1- Médaille d’or : Grèce. Dette publique de 316,969 milliards d’euros, soit 169,1 % du PIB.<br /> <br /> 2- Médaille d’argent : Italie. Dette publique de 2076,182 milliards d’euros, soit 133,3 % du PIB.<br /> <br /> 3- Médaille de bronze : Portugal. Dette publique de 214,801 milliards d’euros, soit 131,3 % du PIB.<br /> <br /> 4- Irlande : dette publique de 204,495 milliards d’euros, soit 125,7 % du PIB.<br /> <br /> 5- Belgique : dette publique de 397,851 milliards d’euros, soit 105 % du PIB.<br /> <br /> 6- Chypre : dette publique de 16,906 milliards d’euros, soit 98,3 % du PIB.<br /> <br /> 7- France : dette publique de 1912,205 milliards d’euros, soit 93,5 % du PIB.<br /> <br /> 8- Espagne : dette publique de 943,410 milliards d’euros, soit 92,3 % du PIB.<br /> <br /> 9- Royaume-Uni : dette publique de 1422,213 milliards de livres sterling, soit 89,6 % du PIB.<br /> <br /> http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/2-23102013-AP/FR/2-23102013-AP-FR.PDF
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A
Pourrait-on ajouter que nous sommes à un stade où la finance (autonomisée de l'économique) inonde tout: économique et politique ?
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A
Lien inextricable entre l'économique et le politique ?<br /> Ou l'un induit-il l'autre ? Mais Lequel ?
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J
<br /> <br /> On peut penser qu'historiquement l'économique était d'abord enkystée dans le politique, puis et c'est ce que j'appelle souvent "l'inondation par l'économique", le schéma s'est renversé. La<br /> mondialisation est une victoire de l'économique...qui passe notamment par une séparation des banques centrales des Trésors publics de naguère.<br /> <br /> <br /> <br />
A
Article remarquable, M. Werrebrouck ! Merci.
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