Le texte qui suit, fut écrit en juillet 2011, époque plus calme que celle que l’on connait aujourd’hui. Nous tenterons d’exprimer dans quelques jours l’esquisse du tableau probable de cette partie du monde qui, jusqu’ici, s’appelait Union Européenne.
En attendant, nous republions ce texte ancien qui s’efforçait de dessiner au-delà des conjonctures et évènements, les fondements paradigmatiques de nombre de nos réalités macrosociales, celles qui vont façonner nos existences depuis la fin de la guerre jusqu’à aujourd’hui.. De quoi comprendre le monde tel qu’il existait, tel qu’il se transformait, tel qu’il aurait pu évoluer et tel qu'il consacrait la puissance d'un Occident unifié… mais qui n’existera probablement plus. Ce texte avait pour titre: "Le monde tel qu'il est".
A l’intérieur du texte, ce qui est écrit en italique est un ajout censé apporter un exemple de confirmation de ce qui était anticipé en 2011.
1 - Les acteurs du jeu social
Dans une société complexe, nous croyons pouvoir identifier 3 catégories d’acteurs : le groupe des entrepreneurs politiques, celui des entrepreneurs économiques, et celui plus divers des citoyens/ salariés/ consommateurs/ épargnants (le « CSCE »).
- Le premier groupe d’acteurs : les « entrepreneurs politiques » ou les « producteurs de l’universel »
Le premier groupe est constitué d’acteurs en concurrence pour l’accès à ce monopole qu’est l’Etat. Animés par un intérêt privé : le goût du pouvoir, voire de la richesse, ils professionnalisent une fonction et transforment en métier, l’édiction de l’universel de la société, à savoir la production du cadre institutionnel et juridique général. A ce titre, il y a travail classique d’utilisation de la contrainte publique à des fins privées. L’objectif privé est la conquête ou la reconduction au pouvoir, utilité pour laquelle il faut supporter et reporter un ensemble de coûts : programmes se transformant en textes, se transformant eux-mêmes en impôts/dépenses publiques ou se transformant en redistribution des niveaux de satisfaction des divers agents relevant du monopole étatique.
Avant la démocratie, les entrepreneurs politiques -tyrans, rois, etc.- mobilisaient volontiers la puissance des idéologies pour pérenniser leur propre puissance prédatrice. N’oublions pas le fondement religieux de la naissance de l’Etat au sein des communautés humaines. L’avènement puis la généralisation de la démocratie ne change pas fondamentalement les données du problème puisque la puissance publique ne peut-être que ce qu’elle a toujours été : un monopole. Il y a simplement - en démocratie - concurrence à partir d’un appel d’offres : quels entrepreneurs auront la charge de la promulgation des textes qui s’imposent à tous et sont donc œuvre d’une entreprise monopolistique à savoir l’Etat ? Un probable moyen de limiter l’utilisation de la puissance publique à des fins privés serait l’interdiction de la professionnalisation de la fonction politique. Un interdit passant par un texte, on voit mal pourquoi les entrepreneurs politiques adopteraient une stratégie allant contre leur intérêt de reconduction sans limite, au pouvoir. En démocratie représentative la professionnalisation de la fonction politique est ainsi devenue un fait largement majoritaire. Avec une nouveauté, qu’il convient de souligner par rapport à la forme antérieure de l’aventure étatique : les entrepreneurs politiques de l’âge démocratique cessent de masquer l’accaparement de la puissance publique à des fins privées par la figure du divin, ou celle du héros souvent tyrannique, et ne sont plus que de simples et paisibles gestionnaires d’une entreprise profane appelée Etat. D’où le glissement du « politique » en « bonne gouvernance » et l’idée associée selon laquelle il n’y aurait plus besoin d’un Etat pesant surplombant tous les acteurs.
Février 2025. Nous invitons ici à resituer les derniers évènements américains : Elon Musk est censé casser l’Etat profond au profit d’une gestion rationnelle. Pensons également aux débats qui, au sein de la « tech, semblent se déplacer vers l’idéologie libertarienne avec la mise en avant des travaux de Hayek et de la vision libertarienne de l’économie.
Les biens ainsi produits par l’entreprise Etat, les « règles du jeu social », parce qu’universelles par nature, pouvaient ainsi apparaître comme porteuses d’un intérêt général. Et la confusion est vite établie : les entrepreneurs politiques auraient ainsi la lourde mission de produire de l’intérêt général, alors que nécessairement, comme toujours, ils doivent surtout veiller à un programme de conquête du pouvoir, ou de reconduction au pouvoir. De fait, on savait déjà que les textes sont toujours des compromis entre acteurs ou groupes d’acteurs aux intérêts divergents, le pouvoir étant donné à ceux pour qui ces compromis concernent positivement, réellement ou imaginairement, une majorité d’électeurs. Nul intérêt général, impossible à définir, ne peut être lu dans un texte qui, par nature, fixant le champ des possibles, est nécessairement fait de contraintes que beaucoup voudraient enjamber et dépasser.
- Le second groupe d’acteurs : « les producteurs de biens économiques »
Le second groupe est constitué d’acteurs en compétition entre eux sur le marché des biens économiques. Les entrepreneurs économiques ont plus de difficulté que les entrepreneurs politiques à s’exprimer avec conviction sur l’idée d’un intérêt général dont ils seraient les producteurs. C’est que les biens économiques ne surplombent pas la société comme le fait son « système juridique ». La baguette de pain du boulanger ne surplombe pas les acteurs comme le fait le code civil. Pour autant ils disposent depuis longtemps d’un outil théologique exprimant la fiction d’un intérêt général : la théorie économique. Cette dernière prétend enseigner que, mus par des intérêts particuliers, les entrepreneurs économiques fabriqueraient un intérêt général : la fameuse main invisible de Smith. Certains en déduisent d’ailleurs que le paradigme de l’économie, s’il était suffisamment répandu, permettrait de se passer de cet universel qu’est l’Etat. Le monde pouvant ainsi passer plus complètement de son âge politique à son âge économique. Et avec lui le passage de l’Etat nation à la mondialisation… L’Universel ultime - celui de la fin de l’histoire, une histoire qui fût si difficile pour le genre humain - étant l’économie comme instance bienfaitrice, et réconciliatrice de toute l’humanité. Avec, toutefois, la grande question des modes d’existence de la souveraineté.
Février 2025. Ce qui se passe aujourd’hui met apparemment en cause la théologie économique et de nouveaux pouvoirs imaginent délaisser les dogmes au profit d’une économie de combat où le multipartisme respectueux des intérêts de chacun laisse la place à des combats bipartisans. Un mercantilisme enrobé dans les droits de l’individu s’affirme brutalement. Le monde à venir devrait être hérissé de barrières appelées droits de douane et les économistes gardiens du libéralisme ont de la peine à imaginer ce que seraient des « barrières optimales ». D’où l’appel en avril 2017 de 25 prix Nobel qui, déjà, s’inquiétaient des thèses protectionnistes de Donald Trump lors de son premier mandat.
Mais la compétition sur le marché des biens économiques passe aussi par des interventions sur le monopoleur qui fixe les règles du jeu : il faut « capturer » la règlementation et se faire aider par les entrepreneurs politiques et leurs collaborateurs d’une « haute fonction publique » pour gagner des parts de marché, être protégés contre des agresseurs économiques, voire pour créer de nouveaux marchés parfois même par le biais d’institutions qui désarment directement les entrepreneurs politiques de la souveraineté : OMC, traités internationaux, etc. Phénomène devenu massif avec l’irruption des autorités administratives indépendantes (AAA), Le politique est devenu ainsi l’art de continuer le jeu de l’économie par d’autres moyens. A charge du politique de bien vendre la règlementation sur le marché politique où il rencontrera, en démocratie, les électeurs. Ce qu’il faut simplement constater à ce niveau c’est que d’autres intérêts privés, ceux des entrepreneurs économiques utilisent aussi, à l’instar des entrepreneurs politiques les outils de la puissance publique aux fins de satisfaire leurs intérêts.
Février 2025. Ce qui se passe depuis quelques jours semble n’être qu’une aggravation de ce qui vient d’être décrit. Avec peut-être même un basculement vers un état antérieur : comment comprendre en effet la bataille pour la disparition du NED ( National Endowment for Democracy) menée par le Département de l’Efficience gouvernementale patronné par Elon Musk ? Fusion du politique et de l’économique ?
- Les citoyens/salariés/consommateurs/épargnants
Le troisième groupe est sans doute très hétérogène. Il s’agit de tous les acheteurs de biens politiques d’une part, et de biens économiques d’autre part. Porteurs de statuts multiples et pour l’essentiel : citoyens (engagés ou non, patriotes ou indifférents, traditionalistes ou modernistes, croyants ou non, etc.), salariés (parfois travailleurs indépendants), consommateurs, épargnants, (on les appellera dorénavant les « CSCE »), ils peuvent être en compétition entre eux (groupes d’intérêts), voire connaître des conflits de statuts, lesquels ne sont pas toujours réductibles à un ensemble de cercles concentriques. Il peut exister des temps où les CSCE connaissent une grande dissociation : l’intérêt du salarié est dissocié de celui du consommateur ; l’intérêt du citoyen est dissocié de celui de l’épargnant etc. Mais il était aussi des périodes où plusieurs de ces intérêts, voire tous allaient dans le même sens. L’avènement de la démocratie n’a pu que développer la force politique de ce troisième groupe. les CSCE peuvent comme les entrepreneurs politiques « capter » la réglementation en achetant avec leurs voix des dispositifs avantageux comme salariés ou consommateurs, ce qu’on appelle le « social- clientélisme ». En ce sens, ils sont comme les autres acteurs (entrepreneurs politiques et économiques) attirés par l’utilisation de l’universel afin de satisfaire leurs intérêts privés. Parce que clients sur le double marché politique et économique, les entrepreneurs qui leur font face doivent en principe les satisfaire.
2 - Complexité des formes de la réalité macrosociale.
Dans les formes primitives des Etats seuls les entrepreneurs politiques – tyrans, princes, etc.- étaient véritablement acteurs et dictaient les règles du jeu. Le cas échéant - en vertu du fait que l’intérêt du loup étant que les moutons soient gras - des entrepreneurs politiques étaient associés dans des institutions à vocation mercantile. Par contre, les CSCE n’ont guère de pouvoir et sont victimes des entrepreneurs politiques qui les enkystent dans un territoire équipé des premières frontières. La souveraineté est celle du plus fort et s’exerce à l’intérieur dudit territoire. Ce qui signifie que les outils de la contrainte publique, appropriés par les entrepreneurs politiques, sont largement orientés vers l’intérieur et que le partage de la souveraineté est peu envisageable.
Février 2025. A l’époque nous n’avions pas encore analysé ce qui est de l’ordre de l’empire et en particulier ce qu’il en était de l’empire russe. Nous y reviendrons et signalons simplement qu’un empire ne connait en principe pas de frontière ce qui n’est pas le cas de ce qui va se produire en Europe après les traités de Westphalie (24 octobre 1648). Les USA vont-ils devenir un empire clasique ne reconnaissant plus les frontières?
L’irruption de la démocratie et des droits de l’homme vont favoriser le décentrement progressif de la captation des outils de la contrainte publique, avec bien sûr l’idée d’un partage de la souveraineté qui deviendra celle d’un peuple. Mais le jeu social qui consiste à capter les outils de la contrainte publique à des fins privées en concurrence et en opposition va déformer de façon croissante l’universel produit in fine par les entrepreneurs politiques dont c’est la mission historique.
Et cette déformation fera que les entrepreneurs politiques seront de plus en plus invités à donner satisfaction aux entrepreneurs économiques les plus dynamiques. Ainsi s’explique une mondialisation construite par les entrepreneurs politiques qui se sont progressivement engagés dans un processus de servitude volontaire : fin des frontières, fin de la monnaie comme bien public, abandon de la souveraineté monétaire, construction des autoroutes de la mondialisation, renoncement aux vieilles missions de services publics, affaissement de la prédation fiscale, fin d’un patrimoine public positif, renoncement à la souveraineté d’une loi désormais encadrée par des autorités nationales ou étrangères appelés tribunaux d’arbitrage, création massive d’autorités administratives indépendantes, etc. Tout cela au nom de l’affermissement de l’idéal démocratique.
Février 2025. Pensons aujourd’hui à ce qu’on appelle l’Etat de droit que l’on dit menacé par les populistes et qui - pour ces derniers - aboutit à l’impuissance publique. Pensons à la bataille du nouveau pouvoir américain, bataille engagée pour détruire « l’Etat profond » Pensons à ce que certains appellent le recul des libertés et à l’illibéralisme triomphant.
Cette déformation considérable du contenu de l’universel n’est pas catastrophique pour les entrepreneurs politiques, leur objectif n’est pas la maîtrise du contenu mais sa capacité à les reproduire au pouvoir. La modification du contenu ne peut évidemment s’aligner sur les seuls intérêts des entrepreneurs économiques. Dans la montée de l’économie et des libertés associées, les CSCE vont connaître de gigantesques évolutions : fin de la citoyenneté au profit de l’individu désirant, développement important des patrimoines et du statut de l’épargnant, modification considérable du statut de salarié jusqu’ici protégé par l’Etat social souvent associé au stade de l’Etat-nation. Globalement, la mondialisation réorganise l’ensemble des liens tissés entre tous les acteurs avec développement de fortes inégalités
3 - Mouvement des intérêts, bouleversement des compromis, émergence d’une forme oligarchique
L’articulation des trois groupes précédemment définis est nécessairement instable en raison du caractère toujours éphémère des compromis passés. Et instabilité aussi déterminée par le manque d’homogénéité des intérêts à l’intérieur de chacun d’eux. Par ailleurs, une grande porosité va se créer entre les 2 groupes d’entrepreneurs et grande porosité qui va dégrader la démocratie au profit de l’oligarchie. Si la capture de la règlementation, par exemple celle qui autorisera la mondialisation, se fait souvent par le harcèlement du régulé sur le régulateur, par exemple celui des 50 000 lobbyistes de Bruxelles sur les instances de décision correspondantes, elle peut aussi s’opérer de façon plus radicale : la fusion du régulateur et du régulé. Ici le producteur/détenteur de l’universel, c'est-à-dire l’entrepreneur politique, « part avec la caisse » et devient entrepreneur économique. La France constitue un modèle de cette fusion. Mais le même résultat peut être obtenu en parcourant le chemin inverse : le régulé devient le régulateur et ainsi « ouvre la caisse » au profit de toute une profession. Les USA constituent un modèle de ce second type de fusion.
Février 2025. Le cas américain est devenu saisissant. Ainsi Elon Musk est officiellement le régulé dans ce qui touche les activités spatiales qu’il développe avec les fonds de la NASA, mais il est aussi, dans le cadre de ses nouvelles fonctions de contrôle des activités fédérales, le régulateur de cette même NASA.
C’est bien évidemment dans ce qui a toujours constitué le point d’intersection entre intérêts politiques et intérêts économiques que ces fusions sont les plus emblématiques et les plus fondamentales : le système monétaire et financier. Ainsi, grandes banques et banque centrale sont en France dirigées par de hauts fonctionnaires. Ainsi, aux USA, le Trésor lui-même et la banque centrale sont généralement dirigés par un banquier.
Porosité par harcèlement, ou mieux par fusion, permet aux deux groupes d’entrepreneurs de se dégager partiellement et progressivement des contraintes de l’âge démocratique de l’aventure étatique. C’est que le coût politique de la capture de la réglementation, déjà diminué en raison de la dissociation du groupe des CSCE, diminue encore si les entrepreneurs politiques peuvent connaître un prolongement de carrière dans l’aventure économique : la perte des commandes de l’universel peut être le point de départ d’une activité autrement rémunératrice. D’où la naissance d’un groupe social en apesanteur, groupe aidé dans ce nouveau statut par le développement du mondialisme. Avec, en conséquence, le passage du stade démocratique vers un stade plus proche de l’oligarchie. Ce que certains évoquent en utilisant l’expression de « surclasse ».
Février 2025. On note que dans le nouveau gouvernement américain une majorité de ministres sont milliardaires. Le président lui-même et son épouse viennent de se lancer dans les crypto monnaies et il en est de même du président argentin Javier Milei. On peut aussi s’interroger sur le président Trump au regard de ses anciennes activités sur le territoire russe. Une partie de l'occident semble ainsi s'éloigner de son berceau européen.
Bien évidemment, le fonctionnement des marchés politiques s’en trouve transformé. Souvent duopoles avec barrières à l’entrée très élevées, la quête de l’électeur médian avait déjà rétréci la distance entre les programmes des deux grandes entreprises que l’on trouvait souvent dans l’âge démocratique des Etats. La porosité puis la fusion ne peuvent que renforcer l’étroitesse de l’éventail de l’offre politique, avec une difficulté de plus en plus grande à distinguer une droite d’une gauche et au final le sentiment de grande confusion… avec toutefois alignement général sur les impératifs de l’économie. Alignement qui n’est que la conséquence logique du processus de fusion en cours : entrepreneurs politiques et entrepreneurs économiques qui étaient en même temps citoyens ne sont plus que des « individus désirants » pataugeant dans mille conflits d’intérêts ou délits d’initiés . Et alignement qui développe aussi des effets pervers : les CSCE les plus éloignés d’une possible intégration dans le groupe des oligarques s’organisent en dehors du duopole classique - les partis ayant vocation à gouverner- et deviennent clients d’entreprises politiques nouvelles, étiquetées sous le label de partis contestataires, ou « populistes ».
Février 2025. On constate la montée des populismes dans de nombreuses régions et en particulier dans nombre de pays de l’Union Européenne. Peu visible en 2011, cette montée est dans la logique du fonctionnement de la réalité macrosociale évoquée.
En mondialisation, les Etats et leurs entrepreneurs politiques ne disparaissent pas. Il y a simple transformation de leur rôle. Et cette altération passe par une certaine fin de l’âge démocratique au profit de l’émergence d’un stade oligarchique avec une utilisation de la contrainte publique à des fins privées, davantage réservée à un petit groupe d’individus.
Février 2025. Ce mouvement concerne en particulier les USA dans la nouvelle version du bloc au pouvoir avec en particulier l’alignement de la Silicone Valley sur le nouveau pouvoir fédéral. Il concerne également l’empire russe où l’économie de guerre est un partenariat très organisé entre oligarques contrôlant l’industrie de l’armement et le pouvoir politique. La distinction entre l'ouest et l'Est qui caractérisait l'ordre de Yalta s'efface doucement.
Pour l’immense majorité, les droits de l’homme semblent se rétrécir à leur définition libérale : vie, liberté, propriété , en abandonnant doucement des droits que l’âge démocratique avait permis d’engendrer.
Février 2025. L’âge démocratique semble s’achever aux USA avec l’avalanche des nouvelles décisions gouvernementales regroupées dans la « théorie de l’exécutif unitaire ». Outil qui semble mettre fin à la séparation des pouvoirs. Mais aussi théorie dont la valeur juridique apparait douteuse pour les juristes français en ce qu’elle efface sans le dire l’Etat de droit. La distinction entre l'Ouest et l'Est qui caractérisait l'ordre de Yalta s'efface doucement.
Le présent texte se voulait simplement analytique et ne propose aucune voie ni aucune solution. Il se veut simple grille de lecture du réel. Ou simple contribution à la connaissance d’un monde qui ne cesse de se transformer : non, Monsieur Fukuyama, l’histoire n’est pas terminée.
Jean Claude Werrebrouck – Juillet 2011
Conclusion:
Le grand tableau dessiné par les acteurs de Yalta fut longtemps modifié par retouches, petites ou grandes. Petites, par exemple pour la décolonisation, voire la fin de Brettons Woods. Plus grandes avec surtout la disparition du mur de Berlin. Au-delà des retouches sur la toile, le support du tableau restait quand même identique avec d’un côté ce qu’on appelait l’Occident et de l’autre ce qui était réputé être le reste du monde. L’époque qui semble vouloir émerger n’est probablement pas affaires de retouches : il ne s’agira plus de coups de pinceau sur la toile mais de changer de support. Le grand tableau de l’ordre de Yalta a peut-être disparu. Nous tenterons de risquer dans quelques jours les contours de la nouvelle toile en gestation. La tâche ne sera pas facile tant les lunettes traditionnelles des uns et des autres rendent collectivement « bigleux ». Les unes nourries d'un paradigme américain rejeté servent mal à justifier le bien fondé de l'ordre russe. Les autres, adoratrices du même paradigme, risquent de ne plus pouvoir servir à observer le monde....Et les entrepreneurs politiques européens, plongés dans une réalité devenue si étrange au regard de leur bruyante inculture, sont confirmés dans leur statut de communicants bavards.
Jean Claude Werrebrouck - 21 février 2025
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